samedi 5 janvier 2013

Ma fille s'appelle Jyoti Singh Pandey

Le père de la victime du viol en Inde  veut que le monde sache que sa fille s'appelle Jyoti Singh Pandey  
Article original par Nada Farhoud et Jalees Andrab pour The Sunday People

Un père anéanti explique au journal The Sunday People qu'il espère qu'en révélant son nom cela donnera du courage à d'autres femmes ayant survécu à une telle attaque.
Badri Singh Pandey, père de Jyoti Singh Pandey. Couverture Asia Press/Shariq Allaqaband.
Shariq Allaqaband

Le monde la connait seulement sous le nom de la Fille de l'Inde qui a été violée en bande et tuée.
Mais aujourd'hui, avec la permission de son père anéanti, nous pouvons révéler son nom : Jyoti Singh Pandey.
Badri, un père courageux de 53 ans  explique à The Sunday People
"Nous voulons que le monde connaisse son véritable nom. Ma fille n'a rien fait de mal, elle est morte en se protégeant elle-même."
"Je suis fier d'elle. Révéler son nom va donner du courage à d'autres femmes qui ont survécu à ces attaques. Ma fille leur donnera des forces."
The Sunday People a interviewé Badri et sa famille dans leur village ancestral de la Dre Billia situé dans le nord de l'Inde dans l'Uttar Pradesh.
Badri Singh Pandey, père de Jyoti Singh Pandey, avec sa famille
Shariq Allaqaband
Ils se sont retirés ici pour porter le deuil loin de leur maison de Delhi, un endroit qui leur rappelle constamment l'agression sexuelle barbare dont Jyoti a été victime après être montée dans un bus avec un ami.
Son épouse Asha, 46 ans, était trop choquée pour parler.
Badri raconte : "Au début, je voulais me retrouver face à face avec les hommes responsables, mais je ne le souhaite plus. Je veux juste entendre qu'un tribunal les a punis et qu'ils vont être pendus."
"La mort pour tous les six Ces hommes sont des bêtes. On devrait en faire un exemple montrant que la société ne tolèrera pas ce genre de choses."
Lorsqu'il se souvient du jour où il a eu connaissance du calvaire de sa fille unique, Badri dit qu'il venait de rentrer un peu après 22h30 le 16 décembre après son service à l'aéroport de Delhi où il travaille.
Sa femme s'inquiétait que Jyoti, étudiante en médecine, ne soit pas rentrée après le cinéma.
Des Indiens participent à une veillée
AP
Badri raconte : "On a commencé à appeler son portable et celui de son ami, mais il n'y a pas eu de réponse."
"Puis à 23h15, nous avons eu un appel de l'hôpital de Delhi nous disant que notre fille avait eu un accident."
Badri a demandé de l'y conduire à moto.
Il explique : "Lorsque je l'ai vue pour la première fois, elle était au lit avec les yeux fermés."
"J'ai mis ma main sur son front et l'ai appelée par son nom. Elle a lentement ouvert les yeux et a commencé à pleurer en disant qu'elle souffrait.
"J'ai retenu mes larmes. Je lui ai dit de ne pas s'inquiéter, d'être forte et que tout se passerait bien."
Nos mères, soeurs et filles ne sont pas en sécurité dans notre propre pays l'Inde, c'est inacceptable et honteux              AP
Une famille indienne allume des bougies à la mémoire de la victime du viol collectif à New Delhi, Inde 

A ce moment là, Badri ne savait toujours pas ce qu'il s'était passé. Un policier le lui a finalement expliqué. Jyoti et son ami Awindra Pandey, 28 ans, étaient montés à bord d'un bus pour rentrer chez eux, mais ont été embarqué sur la route de l'enfer pendant deux heures et demi par le pilote, son assistant et quatre passagers.
Tout deux ont été battus avec des barres de fer et Jyoti a été violée à maintes reprises avant d'être dépouillés et jetés sur une route menant à l'aéroport de Delhi - pas loin d'où travaillait Badri.
Il explique : " J'ai immédiatement appelé ma femme et mes fils pour leur dire de venir à l'hôpital. Mais je ne pouvais pas leur dire pour le viol."
Pendant les dix premiers jours Jyoti était parfois consciente et on avait bon espoir qu'elle puisse survivre. Badri raconte : "Les médecins ont fait de leur mieux pour la sauver. Elle a parlé quelques fois, mais surtout par des gestes. Elle avait un tuyau d'alimentation dans la bouche ce qui la gênait pour parler."
"Elle a écrit sur du papier qu'elle voulait vivre, qu'elle voulait survivre et rester avec nous. Mais c'est le destin qui a eu le dernier mot à la fin."
Jyoti a fait deux déclarations à la police, mais Badri était trop bouleversé pour rester assis à écouter ce que sa fille avait subi.
Cinq hommes ont été officiellement inculpés du meurtre, de l'enlèvement et du viol collectif de Jyoti.
  " Ma femme était avec elle pendant les dépositions mais elle a tellement pleuré après avoir tout entendu ..."
" Elle m'a ensuite raconté ce qui s'était passé. Je n'ai pas les mots pour décrire l'incident. Tout ce que je peux dire, c'est qu'ils ne sont pas humains, pas même animaux. Ils ne sont pas de ce monde."
" C'était tout simplement horrible et j'espère que personne n'aura à endurer ça."
"Elle criait beaucoup, elle souffrait beaucoup. Et quand elle a vu sa mère et ses frères, elle a encore pleuré."
"Mais après ça elle était une fille courageuse, elle essayait même de nous consoler et de nous donner l'espoir que tout allait bien se passer."
Les médecins ont été contraints de retirer les intestins de Jyoti et comme son état s'aggravait, ils l'ont envoyée par avion à Singapour le lendemain de Noël pour des soins spécialisés.
Badri raconte : "Je lui ai dit que tout allait bien se passer et que nous serions bientôt chez nous. Elle était enthousiaste quand on parlait de rentrer et elle souriait."
"J'ai mis ma main sur son front, elle m'a demandé si j'avais dîné, puis elle m'a fait comprendre d'aller dormir. J'ai tenu sa main et l'ai embrassée. Je lui ai dit de se reposer et de ne pas s'inquiéter et elle a fermé les yeux."
 
Jyoti a été emmenée au Mount Elizabeth Hospital pour des soins avant sa mort
Rex
Tandis que Jyoti se battait pour sa vie, des milliers de personnes sont descendus dans la rue pour exiger la pendaison des six accusés et une nouvelle loi contre le viol. Mais trois jours plus tard, le 29 décembre elle a eu une crise cardiaque à l'issue fatale.
Badri raconte : " Je voulais si désespérément qu'elle survive, même si elle aurait du à vivre avec un souvenir de cette attaque et gérer ce traumatisme.
"Nous sommes si bouleversés qu'elle ne soit plus là. Il y a un vide immense dans nos vies. Elle a été au centre de notre univers. Nos vies tournaient autour de la sienne.
"Son absence est si douloureuse, un avenir sans elle est inimaginable."
Badri explique que l'ami de Jyoti, Awindra, n'était pas son petit ami - juste un ami très courageux qui a tenté de la sauver.
Il explique : "Il n'était pas question de mariage car nous appartenons à des castes différentes.
Elle n'a jamais exprimé le désir de se marier. Elle se concentrait sur ses études et voulait un premier travail."
Badri révèle également que Jyoti a souvent mentionné combien Awindra a tenté de la sauver.
 

Un participant allume une bougie à côté d'un panneau au cours d'une veillée pour Jyoti
Reuters
"Elle n'arrêtait pas de dire à sa mère qu'il avait fait de son mieux, mais ils l'ont tabasser à coups de barre de fer."
Badri chérit désormais les souvenirs de sa fille. Il se souvient de son rêve de devenir médecin.
Il explique : "Je lui avais dit que je n'avais pas les moyens de payer pour ça, mais elle était déterminée. Elle voulait être un médecin, gagner beaucoup d'argent et aller souvent à l'étranger."
Lorsque Badri est arrivé à Dehli en 1983, il gagnait 150 roupies par mois, soit l'équivalent de 1,70 € aujourd'hui.
Mais il a vendu certaines de ses terres pour payer les études de sa fille, et a épargné autant que possible sur ses 5 700 roupies (€ 65) par mois qu'il gagne à présent.
Badri raconte : "C'est difficile de vivre à Dehli avec mon salaire, très dur. Mais Jyoti disait qu'elle allait changer tout cela. Elle voulait changer nos vies une fois qu'elle aurait un travail."
Jyoti avait à peine terminé ses de quatre ans de physiothérapie dans une université à l'extérieur de Dehli. Elle faisait un stage quand elle a été attaquée.
Ses frères, Gaurav Singh, 20 ans, et Saurav Singh, 15 ans, étaient proches de leur grande sœur et n'imaginent pas comment ils vont pouvoir faire face à la situation.
Gaurav : "La vie va être si difficile sans elle. Sans ses conseils, je ne sais pas quoi faire ni comment mener ma vie à présent."
Badri et toute la famille ont été touchés par la façon dont la nation les a soutenu.
 Des manifestants indiens brulent une effigie représentant les violeurs lors d'un rassemblement
Il explique : "Le peuple de l'Inde nous a donné la force pour faire face à notre perte. Je pense qu'elle n'est pas seulement ma fille mais également la fille de l'Inde.
Je lisais  les articles sur les viols dans les journaux, mais ne les digéraient jamais vraiment. Nous sommes reconnaissants à tous ceux qui sont venus pour protester contre la barbarie."
Des tests d'ADN ont fait la preuve du lien des cinq hommes et d'un autre de 17 ans présents dans le bus pour le viol et le meurtre. Les hommes paraitront devant la Cour de district dans la zone Saket de la capitale indienne demain. Celui de 17 ans sera jugé séparément comme un mineur.
Badri espère maintenant que les mères et les pères vont apprendre à leurs fils à respecter les femmes.
Il explique : "La police ne peut pas gérer cela toute seule. Mais les parents ont besoin de garder un œil sur leurs enfants aussi."
Le visage de Badri s'est éclairé quand il a parlé des rêves Jyoti et qu'il nous a invité à feuilleter son album de famille. Chaque photo montre sa fille magnifique souriant. Sur la plupart, elle porte des vêtements occidentaux, qu'elle préférait au sari traditionnel . Ses long cheveux noirs et brillant étaient aussi toujours détachés.
En respect avec les souhaits de Badri on ne la dépeint pas.
La diffusion d'une photo sera pour un autre jour.
La loi indienne interdit de nommer une victime de viol à moins qu'elle l'autorise ou, si elle est morte, que sa famille l'accepte.
Pour le moment, pour cette famille dévastée, autoriser la diffusion du nom de leur fille chérie suffit.



Pétition sur avaaz.org : Mettons fin à la guerre de l'Inde contre ses femmes

jeudi 27 décembre 2012

Le bunker de Saddam


L'immense salle à manger au toit en forme de dôme tient toujours. Les piliers ornés de plâtre aussi, mais on ne reconnaît plus rien du reste de la pièce en ruine.

 Au milieu du hall circulaire, à la place de l'immense table luxueuse où se seraient assis tout ce qui se fait de mieux du parti Baath de Sadam, deux tranchées profondes.



 En levant les yeux au plafond, les deux trous en plein milieu du dôme montrent bien par où sont passées les bombes lancées depuis plus de 40 000 pieds avant de tomber sur le palais.

Tout autour ne subsistent que des ruines. Des tiges de bétons armés ont été tordues autour d'un pilier par la force de l'explosion.

A travers les murs carbonisés, la lumière filtre. Ce que les bombes américaines visaient, ce sont ces débris et ces tiges en fers tordues recouvertes de poussière.

L'ensemble du palais n'était qu'une déguisement élaboré pour l'abri nucléaire et le centre de commandement souterrain de Saddam Hussein.

C'est immense, 1 800 m², et ça n'a même pas été égratigné par les sept bombes à fragmentations anti-bunker, ni par les 20 missiles de croisières tirés pendant la guerre.

Comme beaucoup d'autres bâtiments immenses et somptueux éparpillés à travers l'Irak, de l'extérieur, le palais tient debout.

" Derrière les maçonneries décoratives on dirait que c'est un  " gros gâteau de mariage composé de couches de béton," explique John Carter, un ingénieur britannique travaillant en Irak et qui a pris un intérêt particulier à l'abri, offrant même de temps en temps des visites aux initiés


Les couches de bétons ont trompé les missiles spécialement conçus pour "compter" le nombres d'étages dans lesquels ils passent avant d'exploser.

De retour à l'air libre, John m'a emmené dans une des cinq entrées du bunker, celle que les Rangers américains ont utilisé, en faisant exploser l'énorme sas en métal.

Nous avons emprunté un escalier en colimaçon pour arriver 60 pieds sous terre dans le long couloir qui mène au refuge qui pourrait résister si une bombe nucléaire de la taille de celle d'Hiroshima, était lâchée à seulement 200 mètres de là.

"Ça se voit que les pillards ont tout pris. Depuis deux ans que je viens ici, les choses ont pas trop bougé. C'est dommage parce que si on avait soudé les portes ça aurait fait un super musée" explique John.



Et il reste vraiment pas grand chose.

La salle de contrôle, là où était géré le système de protection au gaz, et aussi la salle de montage télé, quelques lecteurs de cassettes et panneaux de configuration, mais c'est tout.

C'est ici que Baghdad Bob se tenait quand il enregistrait ses messages sur Al-Jazeera, la seule équipe télé autorisée qui avait même une salle de réunion dans laquelle se trouvait une énorme carte en relief éclairée.
Dans la suite de Saddam Hussein une pièce à la moquette moelleuse, il ne reste plus qu'un petit bout de son bureau. Ils ont même essayé de prendre la porcelaine de la salle de bain, et tous les robinets ont disparus.


John raconte que "L'homme qui a conçu le bunker était le petit fils de la femme qui avait conçu le bunker d'Hitler. Il a été construit par les hommes de Tito en Yougoslavie entre 1975 et 1983."

Il y a un générateur, une usine de filtrage d'air et de traitement des eaux dont les tuyaux ont été volés, et du coup l'eau inonde le bunker, mais sans jamais dépasser le niveau du sol grâce à un système de vidage dans le Tigres.

Avec les aliments séchés et les produits frais dans les chambres froides des gens auraient pu vivre plus de 12 mois dans le bunker.

Il y a partout  une odeur de renfermé et d'humidité; et pas d'électricité. 
A l'endroit de la séparation entre le palais et le bunker,faites à l'aide de gros ressorts pour le protéger d'une explosion, il y a un trou dans la grille métallique au plancher par lequel on peut voir l'eau en dessous.

"C'est ici qu'on a perdu un capitaine" rigole John, "mais on l'a sorti de là.Les pilleurs voleraient n'importe quoi qui n'est pas cassé."

Et dans la plus grande des chambres, encore une fois, joliment tapissée comme si c'était la  salle de réunion du parti Baas, John m'a demandé de lever les yeux.

" On est juste sous la salle à manger principale que les bombes ont frappées, et tout va bien"

Une sacré pièce d'ingénierie souterraine protégée bien que détruite sur le dessus. Ca aurait fait un super musée, et qui sait ....

samedi 15 décembre 2012

Un accord scandaleux avec HSBC prouve que la guerre contre la drogue est une farce



Si vous avez déjà été arrêté pour une affaire de drogue, si vous avez passé ne serait-ce qu'un jour en prison pour avoir eu un bout de cannabis dans votre poche ou une pipe dans votre sac de sport, Larry Breuer l'assistant au procureur général et ami de longue date de Bill Clinton a un message pour vous : Allez-vous faire voir !
Breuer a signé cette semaine un accord avec le géant bancaire britannique HSBC qui est l'insulte ultime pour toute personne ordinaire qui a déjà vu sa vie changée par une inculpation en rapport avec les narcotiques. Bien que HSBC ait admis avoir blanchi des milliards de dollars pour les cartels de la drogue colombiens et mexicains (entre autres) et avoir violé un tas de règles bancaires importantes (concernant le secret bancaire et les règles anti concurrence), Breuer et son ministère de la justice ont choisi de ne pas engager de poursuites judiciaires à l'encontre de la banque, préférant un accord de 1,9 milliards de dollars, ce qui correspond selon un analyste à environ cinq semaines de revenu pour la banque.
Les transactions de blanchiment de la banque se faisaient de manière si effrontée que la NSA aurait surement pu les remarquer depuis l'espace. Breuer a reconnu que les trafiquants de drogue venaient parfois dans les agences mexicaines de HSBC pour y " verser des centaines de milliers de dollars en espèce, le même jour et sur un unique compte, en se servant de boites qui correspondaient exactement à la fenêtre du guichetier" Les hommes de Tony Montana apportant des duffle-bag rempli de cash à la fictive "American City Bank" de Miami étaient en fait plus subtiles que les cartels qui blanchissaient leur liquide dans une des plus importantes institutions financière britannique.
Bien que ce n'ait été déclaré explicitement, la logique du gouvernement pour ne pas poursuivre pénalement la banque tiendrait apparemment du fait que placer des dirigeants d'une institution systémiquement importante pour blanchiment d'argent de la drogue menacerait la stabilité du système financier. Le New York Times le formule de cette façon :
Les autorités fédérales et locales ont choisi de ne pas inculper HSBC, la banque basée à Londres, sur des accusations de blanchiment d'argent important et prolongé, par peur que des poursuites judiciaires fasse s'effondrer la banque, et dans le même temps mette en danger le système financier.
Pas la peine d’être un génie pour voir que ce raisonnement est plus que vicié. Lorsque vous décidez de ne pas poursuivre des banquiers pour des crimes portant sur plusieurs milliards de dollars et liés à des trafics de drogue et au terrorisme (des clients de HSBC saoudiens et bangladais avaient des liens avec des terroristes d'après une enquête du sénat), ça ne protège pas le système bancaire du tout, au contraire. Cela terrifie les investisseurs et les déposants partout, les laissant avec une impression claire que même les banques les plus "réputées" sont en fait des institutions conquises dont les dirigeants sont utilisés par des meurtriers et des terroristes. La réponse du ministère de la justice est encore plus choquante. En apprenant tout ça, ils ont choisi de faire exactement comme les dirigeants de HSBC, ils ont pris l'argent et ont regardé ailleurs.
Et non seulement ils se sont vendus aux trafiquants de drogue, mais ils se sont vendu pour pas grand-chose. Vous allez entendre cette semaine l'administration Obama se vanter de s'être battu pour une pénalité record à l'encontre de HSBC, mais c'est une blague. Certaines des sanctions vont véritablement vous faire mourir de rire. 
Un extrait de l'annonce de Breuer:
A la suite de l'enquête du gouvernement, HSBC a : . . "récupéré" les bonus compensatoires différés donnés à ses employés américains les plus expérimentés des services de lutte contre le blanchiment, et a accepté de différer partiellement les bonus à ses employés pour la période de 5 ans pendant laquelle aura lieu l'accord.
Waaw ... Donc les dirigeants qui ont passé 10 ans à blanchir des milliards de dollars devront partiellement différer leurs bonus pendant les cinq ans de l'accord ? Non, mais vous plaisantez là ? C'est la punition ? Les négociateurs du gouvernement ne pouvaient pas être ferme et forcer les dirigeants de HSBC à attendre vraiment pour recevoir leurs bonus ? Ils ont dû se contenter de les faire attendre "partiellement' ? Tout procureur honnête aux USA doit vomir devant de telles tactiques de marchandage. Quelle était la première offre du ministère de la justice, demandé aux dirigeants de réduire leurs vacances dans les Caraïbes à 9 semaines par an ?
On peut se demander qu'elle soit la sanction financière appropriée pour HSBC ?
 Quelle somme d'argent devrait-on enlever à une entreprise qui a honteusement bénéficié de faire des affaires avec des criminels pendant des années ? Nous parlons ici d'une entreprise qui a reconnu toute une palette des graves crimes bancaires. Si vous étiez le procureur, vous tiendrez cette banque par les couilles. Combien d'argent devriez-vous prendre alors ?
Que diriez-vous d'environ tout ? Que diriez-vous de chaque dollar que la banque a généré depuis qu'elle a commencé ses activités illégales ? Que diriez-vous de plonger dans le compte bancaire de chaque dirigeant impliqué dans ce foutoir et de prendre chaque dollar de bonus qu'ils ont gagné ? Prenez aussi leurs maisons, leurs voitures, leurs tableaux achetés aux enchères de Sotheby, les vêtements dans leurs penderies, la petite monnaie dans les pots sur les plans de travail de leurs cuisines, et mêmes leurs slips. Prenez tout sans hésiter. Et puis jetez-les en prison.
Ça vous parait dur ? N'est-ce pas ? Mais le problème c'est que c'est exactement ce que le gouvernement fait tous les jours aux gens ordinaires impliqués dans des affaires de drogues ordinaires.
Il serait intéressant de demander aux habitants de Tenaha au Texas, par exemple, ce qu'ils pensent de l'accord de la HSBS. Il s'agit de la ville dans laquelle la police locale arrête les motards (surtout "noirs") et, lorsqu'ils trouvent de l'argent en liquide offrent deux possibilités : Soit ils acceptent que la police saisisse l'argent, soit ils sont accusés de blanchiment et de trafic de drogue.
On pourrait aussi demander à Anthony Smelley, cet habitant de l'Indiana qui a gagné 50 000 $ dans un accord à propos d'un accident de voiture et qui transportait environ 17 000 $ de cet argent liquide dans sa voiture lorsqu'il a été arrêté. Sa voiture a été fouillée par les policiers et des maitres-chiens. Les chiens ont marqué l'arrêt par deux fois. Aucune drogue n'a été trouvée, mais la police a quand même pris l'argent. Et même après que Smelley ait fourni les documents prouvant l'origine de son argent, les fonctionnaires de Putnam County ont tenté de garder l'argent arguant qu'il pourrait se servir de l'argent pour s'acheter de la drogue dans le futur.
C'est arrivé pour de vrai. Ça arrive tout le temps, et même le ministre de la justice de Larry Breuer s'y met. Rien qu'en 2010, les bureaux des procureurs ont versé presque' 1,8 milliard sur des comptes gouvernementaux suite à des confiscations essentiellement dans des affaires de drogue.
Si on vous arrête aux USA avec de l'argent liquide et que le gouvernement pense qu'il s'agit d'argent de la drogue, cet argent servira à votre sheriff local ou à un chef de la police pour s'acheter un Ford Expedition.
Et ce n'est que la cerise sur le gâteau. Ce que vous gagnez vraiment de votre rencontre avec un policier, si jamais vous êtes lié d'une façon ou d'une autre avec la drogue, c'est une peine criminelle grotesque. A New York, une affaire sur sept qui passe devant un tribunal est une affaire liée à la marijuana.
Rien que l'autre jour, quand Breuer annonçait sa tape sur les doigts à l'encontre des plus prolifiques blanchisseurs d'argent de la drogue, j'étais au tribunal des comparutions initiales de Brooklyn à regarder comment il s'occupait des vrais gens. Un avocat de la défense a expliqué l'absurdité des arrestations pour drogue de cette ville. En réalité, New York a des lois assez libérales en ce qui concerne le cannabis (la police n'est pas censée vous arrêter si vous détenez la drogue dans un endroit privé. Mais alors comment font-ils pour faire 50 377 arrestations liées à la beuh rien que dans cette ville ? C'était en 2010, en 2009 il y en a eu 46 492.
"Ce qu'ils font, c'est qu'ils vous arrêtent dans la rue et vous disent de vider vos poches" explique l'avocat de la défense. "Et là, dès qu'une pipe ou une graine sors de la poche, boom, c'est considéré comme usage public." "Et vous vous faites arrêter"
Les gens passent des nuits en prison, voire pire. A New York, même s'ils s'en tiennent à un délit mineur pour lequel vous avez fait votre peine, vous devez payer 200 $ et vous faire prendre votre ADN, processus pour lequel vous devez payer 50$. Même au-delà de ça, il n'est pas nécessaire de chercher bien loin pour trouver des histoires de peines draconiennes et idiotes pour des affaires de drogue non violentes.
Demandez à Cameron Douglas, le fils de Michael Douglas, qui s'est pris cinq en de prison pour simple possession. Ses geôliers l'ont gardé en confinement solitaire 23h par jour pendant 11 mois lui refusant les visites de sa famille et de ses amis. Et même si le prisonnier typique pour affaire de drogue non violente n'est pas le fils blanc d'une célébrité, il s'agit souvent d’une minorité d'usagers qui reçoivent des condamnations bien plus dures que les riches gamins blancs bien qu'ils aient commis le même crime. 

Souvenons-nous de la controverse entre le crack et la coke dans laquelle il était apparu que les consignes fédérales et locales encourageant des peines jusqu'à 100 fois plus dures pour les utilisateurs de crack que pour les utilisateurs à dominance blanc de coke en poudre.
Le biais institutionnel dans les consignes concernant les peines dans les affaires de crack est scandaleusement raciste, mais cet accord avec HSBC va encore plus loin. En fuyant les poursuites criminelles contre les principaux blanchisseurs au motif que des poursuites mettrait en danger le système financier mondial, le gouvernement a formalisé le double standard.
Ils disent que désormais si vous ne faites pas partie des rouages du système financier mondial, rien ne vous sera épargné, même pas la simple possession. Vous serez emprisonné et tout l'argent liquide qu'ils trouveront sera saisi sur place et converti en nouvelles voitures ou jouets pour l'équipe SWAT locale, qui sera déployée pour défoncer les portes des maisons où d'autres rouages non utiles vivent. Si vous n'avez pas un travail d'importance systémique, la position du gouvernement est telle que vos biens peuvent être utilisés pour financer votre propre incapacité.
Par contre, si vous êtes une personne importante, et que vous travaillez pour une grande banque internationale, vous ne serez plus poursuivis même si vous blanchissez neuf milliards de dollars. Même si vous êtes activement en connivence avec les personnes au sommet du commerce international de narcotiques, votre punition sera bien moindre que celle de la personne tout en bas de la pyramide mondiale de la drogue. Vous serez traité avec plus de déférence et de sympathie qu'un junkie qui s'évanouit dans une rame de métro de Manhattan (utiliser deux sièges de métro est un délit poursuivi fréquemment dans cette ville). Un trafiquant de drogue international est un criminel et souvent un meurtrier, l'accro à la drogue dans la rue est une de ses victimes. Mais grâce à Breuer, nous en sommes désormais, et officiellement, à emprisonner les victimes tout en habilitant les criminels.
La honte des hontes. Ça n'a aucun sens. Il n'y a pas de raison pour que le ministère de la justice ne soit pas parvenu à attraper toutes les personnes impliquées à HSBC dans le trafic et à les poursuivre pénalement, pour ensuite travailler avec les régulateurs des banques pour faire en sorte que la banque survive la transition vers la nouvelle gestion. En l'état, HSBC aurait dû virtuellement remplacer toute son équipe de gestion. Les coupables étaient apparemment pas si important à la stabilité de l'économie mondiale vu qu'ils ont tous quitté leurs postes.
Il n'y a donc aucune raison pour qu'ils ne soient pas traduits en justice. Ne pas les poursuivre n'est que lâcheté et pure corruption, rien d'autre. En acceptant cet accord, Breuer a retiré l'autorité morale du gouvernement pour poursuivre quiconque pour un autre délit concernant la drogue. Ce n'est pas comme si la plupart des gens ne savait pas que la guerre aux drogues est une blague, mais là c'est officiel.

 Article original de Matt Taibi posté sur http://www.rollingstone.com le 13 décembre 2012